Fusariose : les recherches progressent
6 juillet 2021
Comme mentionné dans le point d’actualité de décembre 2020 les recherches sur la fusariose de l’ail sont très actives en France ces dernières années. A l’origine de cette dynamique la filière de l’ail, avec en tête Prosemail, et INRAE. Point majeur de cette dynamique, la thèse réalisée par P. Chrétien entre mars 2018 et février 2021 sous la direction scientifique de C. Leyronas et C. Morris (unité Pathologie Végétale, INRAE Avignon) grâce au financement d’une bourse CIFRE et de Prosemail, d’Alinéa et du Syndicat de l’ail rose de Lautrec. La thèse dont le mémoire est téléchargeable librement à l’adresse suivante https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-03211009, a produit plusieurs résultats significatifs.
L’incidence de la fusariose sur bulbes évaluée
Une enquête a été réalisée sur 3 années (2017-18-19), dans la Drôme et dans le Sud-ouest, sur 53 lots d’ail blanc, 48 lots d’ail rose et 31 lots d’ail violet. Au total, dans ces 132 lots*, ce sont 5493 caïeux qui ont été pelés et examinés. 55% d’entre-deux présentaient des symptômes typiques de fusariose. Le nombre de caïeux symptomatiques par tête s’est révélé significativement plus élevé dans les variétés de type violet et blanc que dans les variétés de type rose. C’est surprenant car contraire à ce qu’observent les producteurs (plus de pertes post récolte sur ail rose). Le fait que dans la thèse même les taches de fusariose de quelques millimètres aient été comptabilisées peut expliquer ce résultat car toutes les petites taches n’évoluent pas vers des symptômes menant au déclassement des têtes.
Les agents pathogènes formellement identifiés
Sur plus de mille souches de Fusarium identifiées par biologie moléculaire, 94% appartenaient à l’espèce F. proliferatum et 6 % à l’espèce F. oxysporum. Les deux espèces ont été retrouvées sur des variétés d’ail blanc, rose et violet et dans les deux bassins de production. Après inoculation sur caïeux en conditions contrôlées, un sous ensemble de 122 souches de F. proliferatum et 6 de F. oxysporum ont confirmé leur capacité à reproduire des symptômes.
La littérature indique que F. proliferatum est un champignon polyphage, c’est à dire qu’il peut s’attaquer à plusieurs espèces végétales. Dans un projet en cours (OCARINA, financement INRAE), l’unité Pathologie Végétale cherche à savoir si F. proliferatum de l’ail peut être abrité par des espèces cultivées en rotation avec l’ail (blé, maïs, tournesol) et donc si ces espèces peuvent servir de relai pour l’inoculum du champignon entre deux cultures d’ail. De plus, le projet OCARINA permettra d’évaluer si F. proliferatum se dissémine par voie aérienne ou si c’est un champignon majoritairement tellurique.
L’infection des tissus des caïeux en partie élucidée
Suite à des inoculations de caïeux au labo et des observations microscopiques, il est apparu que la colonisation des racines de l’ail par F. proliferatum est facilitée par l’émergence des racines qui crée des blessures naturelles et des débris cellulaires. Le mycélium du champignon n’entre pas dans les cellules saines et semblent devoir les dégrader avant de croitre à l’intérieur. Ces résultats disponibles dans l’article suivant https://oajournals.fupress.net/index.php/pm/article/view/11103/11618 montrent la possibilité d’infection de l’ail par les caïeux au moment de la sortie des racines. Cependant une infection de l’ail par voie aérienne n’est pas exclue et doit être explorée (en cours dans le projet OCARINA).
Détection et identification des réservoirs à venir
Les recherches vont se poursuivre notamment pour continuer la mise au point de la méthode de détection démarrée dans la thèse et l’identification des réservoirs d’inoculum démarrée dans le projet OCARINA. Une partie des activités sera réalisée dans cadre du projet BEYOND (2021-2026, financement ANR) et potentiellement dans celui du projet GARLIC s’il reçoit un financement du CASDAR. En effet, ce projet a été soumis à l’appel à projet « Semences et Sélection Variétale » et s’il est financé, il sera réalisé en étroite collaboration entre INRAE, Prosemail et l’université d’Avignon.
Auteur : Christel LEYRONAS, INRAE, Pathologie Végétale, 84140 Montfavet